Les escaliers de mamie

Quand j’étais tout petit, à chaque fois que j’allais voir ma grand-mère, je me rétamais dans ses escaliers. C’est un souvenir très net. Je me demande même s’il ne m’arrivait pas de tomber plusieurs fois. Une fois à chaque étage, aussi bien en montant qu’ en descendant. On attribue souvent aux sourds et malentendants un mauvais sens de l’équilibre (car c’est l’oreille interne qui gère ça , je crois). Mais dans mon cas, pourtant, je n’ai jamais eu de problème de ce genre. Au contraire. J’étais un petit garçon de cinq ou six ans très agile, toujours prêt à courir, à grimper, à tester mes limites physiques et à les repousser.

Chez mes parents, je connaissais l’escalier par cœur. Je pouvais monter ou descendre les marches en courant. Ou plutôt en bondissant, avec une grâce toute féline. A peine avais-je réussi une série de descente de marches par paquet de trois, que je recommençais en augmentant la difficulté. Je me rappelle avoir essayé les yeux fermés et y être parvenu plusieurs fois, validant cet exercice sans difficultés. Mais je restais souvent frustré de ne pouvoir égaler les performances des supers héros. Spiderman ou Daredevil devaient me trouver aussi agile qu’un pachyderme. J’avais encore beaucoup de progrès à faire.

Je crois que ces gamelles à répétition étaient dues au fait que les escaliers de ma grand-mère étaient en béton brut. Ce matériau leur procurait une rugosité à l’épreuve de toute glissade. Même mouillés, ils restaient incroyablement rêches et granuleux. Cette particularité bouleversait toutes les techniques que j’avais développé pour gravir les marches à toute vitesse.

Je crois aussi que la hauteur et la profondeur des marches ne correspondait pas aux autres escaliers auxquels j’étais habitué. Cette différence de taille contrariait également tous les réglages « mentaux » des gestes et sauts que j’effectuais.

L’obligation de ralentir la cadence s’imposait d’elle même. Car en cas de chute, les réceptions étaient parfois « saignantes ». Particulièrement dans les descentes ou le seul moyen de me réceptionner quand je tombait était de tendre mes petites mains vers le béton âpre et raboteux qui se rapprochait…

J’en garde des souvenirs « poignants ».

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